Corruption: Petrobras publie des résultats incomplets et chute en Bourse
Dans un communiqué inhabituellement publié en pleine nuit, Petrobras a annoncé une chute de 9,07% de son bénéfice net au troisième trimestre par rapport au troisième trimestre 2013, à 3,087 milliards de réais (1,2 milliard de dollar.
Ce résultat est inférieur de 38% à celui du 2e trimestre 2014. De janvier à septembre, Petrobras a dégagé un bénéfice net de 13,4 milliards de réais, en baisse de 22% par rapport à la même période en 2013.
La compagnie attribue ce mauvais résultat à la détérioration de la production et de l'exploitation du pétrole sur la période, à la dévaluation du réal face au dollar et à la suspension des travaux pour la construction de deux raffineries.
Ce résultat préliminaire avait déjà été reporté à deux reprises en 2014. Il n'a toujours pas été validé par l'auditeur externe de Petrobras en raison du fait qu'il n'évalue pas, contrairement aux attentes du marché, le montant des détournements de fonds, pots-de-vins et surfacturations de travaux au sein du groupe visés par une retentissante enquête judiciaire.
La réaction du marché été immédiate. L'action Petrobras a plongé de plus de 8% peu après l'ouverture de la Bourse de Sao Paulo. Petrobras accentuait ses pertes en cours de séance, perdant 11,31% à 9,02 réais à 13H19 locales (15H19 GMT), entraînant dans sa chute l'indice Ibovespa de la Bourse de Sao Paulo (-1,93%).La réaction du marché est rationnelle parce qu'on ne connaît pas exactement la valeur des actifs du géant étatique, a commenté à l'AFP l'analyste Eduardo Velho, chef économiste chez Invx Global.
Petrobras souligne dans son communiqué qu'il est impossible de calculer de façon correcte, complète et définitive les dépréciations d'actifs subies.
Le groupe réalise qu'il sera nécessaire de procéder à des ajustements de ses comptes pour introduire des modifications de la valeur de ses actifs fixes affectés par les contrats frauduleux passés (...), ajoute la compagnie.
Selon la police, les malversations au sein de Petrobras s'élèvent à près de quatre milliards de dollars en 10 ans.
- Appel de Dilma Rousseff -
Les opérateurs de marché estiment que la dépréciation d'actifs de la compagnie, liée directement ou indirectement au scandale, variera entre 10 et 20 milliards de dollars.
L'affaire Petrobras, qui fait trembler la coalition au pouvoir, a éclaté en pleine campagne électorale pour les élections présidentielle et législatives, à la suite des découvertes de l'enquête lava jato (karcher) sur un vaste réseau de blanchiment d'argent.
Les enquêteurs ont mis à jour l'existence d'un cartel de sous-traitants incluant les plus grandes entreprises de construction du pays, qui versait des dessous-de-table à certains directeurs de Petrobras pour obtenir de juteux contrats.
Une partie de ces pots-de-vin étaient reversés à des parlementaires, principalement de la coalition de gauche au pouvoir, dont les noms sont encore à ce jour couverts par le secret de l'enquête.
Trente neuf personnes au total, entrepreneurs de construction et ex-responsables du groupe pétrolier, sont actuellement poursuivies pour leur implication présumée. Plusieurs dizaines de politiciens pourraient également être visés.
Fin décembre, Petrobras a interdit provisoirement tout nouveau contrat avec les entreprises de construction accusées, dont les géants Odebrecht, Andrade Gutierrez et Camargo Correa.
Mardi, à la veille de la publication des résultats, la présidente Dilma Rousseff a plaidé en faveur de Petrobras et des entreprises impliquées dans les malversations.
Nous devons fermer la porte à la corruption et poursuivre les coupables, mais l'action de la justice ne peut pas être synonyme de destruction d'entreprises privées qui sont essentielles pour l'économie brésilienne, a déclaré la présidente lors de la première réunion ministérielle de son second mandat.
En pleine tourmente, Petrobras est par ailleurs sous la menace d'une dégradation de sa note d'investissement par les agences de notation. La compagnie cherche à renflouer sa trésorerie pour limiter ses besoins en financements extérieurs dans les prochains mois.
La présidente de Petrobras, Graça Foster a ainsi indiqué que la compagnie n'allait pas répercuter l'effondrement récent du prix du brut sur ses prix de vente d'essence et de diesel, ce qui dans la situation actuelle favorise exceptionnellement la trésorerie du groupe.
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