Nigeria: le président Buhari va s'attribuer le crucial ministère du Pétrole
Le président Buhari a indiqué à New York où il participe à l'Assemblée générale de l'ONU, qu'il prendrait en mains le ministère du pétrole. Il sera assisté d'un secrétaire d'Etat en charge de gérer les affaires courantes de ce secteur, a confirmé mercredi le porte-parole de la présidence, Femi Adesina.
Le Nigeria, premier producteur africain de pétrole, dépend à 70% de ses exportations de brut pour son budget et à 90% pour ses recettes en devises.
Le président Buhari aura mis quatre mois à composer son cabinet. Ce retard serait lié à sa volonté de vérifier, dans le cadre de sa lutte contre la corruption, les parcours des candidats potentiels à des postes gouvernementaux.
Avant sa prise de fonctions, une commission avait recommandé à M. Buhari de rationaliser le nombre de ministères et de ministres.
M. Buhari, 72 ans, a pris ses fonctions le 29 mai et s'en est pris en priorité, dans sa campagne contre la corruption, au géant national du pétrole, la NNPC.
Il avait participé à la mise en place de la Compagnie pétrolière nationale nigériane (NNPC) en 1977, lorsqu'il était ministre du Pétrole sous la présidence du général Olusegun Obasanjo. M. Buhari a aussi été en charge du Petroleum Trust Fund (PTF) dans les années 90.
Le président Buhari s'est engagé à récupérer des sommes hallucinantes de pétro-dollars détournés et punir les responsables. En juin, le chef de l'Etat a congédié l'intégralité du conseil d'administration de la NNPC et ordonné un audit de ses finances.
Début août, Emmanuel Kachikwu, ancien vice-président exécutif d'ExxonMobil Africa et docteur de la prestigieuse université américaine d'Harvard, était nommé directeur général et depuis, 38 cadres supérieurs ont été remerciés.
Pour l'analyste spécialisé sur l'Afrique de la société de conseil en matière de risques Verisk Maplecroft, Malte Liewerscheidt, la décision de Muhammadu Buhari lui fournit le pouvoir maximum pour mettre en place les réformes nécessaires dans le secteur.
Elle a également montré l'importance que revêt pour lui la refonte de l'industrie pétrolière, a indiqué à l'AFP l'analyste, qui a toutefois mis en garde contre une concentration des pouvoirs, qui pourrait envoyer le mauvais message pour les réformes à venir.
La concentration des pouvoirs est une des principales raisons des mauvaises performances du Nigeria dans la gouvernance du secteur pétrolier, a prévenu M. Liewerscheidt par courriel.
M. Buhari devra assurer que la combinaison des rôles de président et de ministre du Pétrole ne sera qu'une mesure temporaire et extraordinaire le temps d'accélérer la mise en place des réformes, a-t-il ajouté.
M. Obasanjo s'était lui aussi attribué le poste de ministre du Pétrole lors de sa présidence, en tant que civil, de 1999 à 2007, et Muhammadu Buhari devra se prémunir contre tout abus ou perception d'abus.
Cette nomination du chef de l'Etat comme ministre est une stratégie à haut risque, car elle lie son destin de président à la réussite de la réforme du secteur du pétrole et du gaz, selon l'analyste.
S'il ne parvient pas à obtenir rapidement des résultats concrets, il n'y aura pas de ministre à mettre en cause, a insisté M. Liewerscheidt.
(c) AFP