Le marché peu affecté à court terme par l'accord avec l'Iran
Après cinq jours d'âpres négociations, les grandes puissances et l'Iran ont annoncé un accord au terme duquel la république islamique acceptera de limiter son programme nucléaire en échange d'un allègement des sanctions économiques, ouvrant une nouvelle période de pourparlers sur le fond pendant six mois.
Les cours du brut réagissaient négativement à cet accord lundi en cours d'échanges européens, mais ne reculaient que de -1,61% à Londres (à 109,26 USD) et -1,33% à New York (à 93,58 USD) à 12H00 GMT.
"Cet accord intérimaire est seulement une première étape et n'a pas d'impact sur les sanctions actuellement en place sur les exportations pétrolières iraniennes", explique à l'AFP Harry Tchilinguirian, stratégiste chez BNP Paribas.
"L'Iran obtient seulement une levée +limitée, ciblée et réversible+ des sanctions internationales sur ses secteurs financier et énergétique", abondent dans une note les analystes du Credit Suisse.
Les experts ont relevé pour l'instant deux éléments susceptibles d'avoir un impact immédiat sur le marché pétrolier.
Tout d'abord, la possibilité pour les assureurs européens d'assurer de nouveau des cargaisons de brut en partance d'Iran, ce qui devrait rendre "le pétrole iranien plus disponible pour les acheteurs asiatiques", estime-t-on chez Commerzbank.
D'autre part, d'importants stocks de brut prêts à partir d'Iran pourraient "rapidement s'écouler sur le marché", indiquent les analystes du Credit Suisse, qui les évaluent entre 25 et 30 millions de barils.
À moyen terme, si un accord définitif était atteint et les sanctions complètement levées, environ 1 million de barils par jour (mbj) de pétrole iranien pourrait revenir sur un marché mondial déjà bien approvisionné, selon les estimations de plusieurs analystes.
Les sanction ont effectivement fait chuter les exportations iraniennes de brut de plus d'un million de barils par jour, de 2,5 mbj en 2011 à 1,1 mbj sur les neuf premiers mois de l'année 2013, selon l'Agence internationale de l'Énergie (AIE).
"Il va être difficile d'accroître rapidement les livraisons de 1 mbj étant donné les infrastructures vieillissantes", tempère cependant Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital, qui souligne que "redémarrer des installations n'est jamais facile".
"Selon nous, les estimations selon lesquelles cela pourrait prendre des années avant de rétablir le niveau de production pré-sanctions (environ 3,8 mbj) sont trop pessimistes", jugent de leur côté les économistes du Credit Suisse.
"Nous projetons que deux trimestres après la levée complète des sanctions, l'Iran aura retrouvé 75% de son manque à gagner en production", ajoutent-ils.
L'impact d'un tel afflux de pétrole iranien sur les cours du brut reste toutefois incertain.
Pour Julian Jessops, économiste en chef pour les matières premières du cabinet Capital Economics, le cours du Brent pourrait chuter de 10 dollars.
Mais, comme le rappelle M. Kryuchenkov, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), dont l'Iran est membre, va "essayer de défendre la barre des 100 USD", notamment via une réduction de la production de l'Arabie saoudite.
Le premier producteur mondial de brut amortit en effet les hausses et les baisses de production de ses partenaires, afin de maintenir le cours du brut autour des 100 USD le baril, niveau qu'il estime idéal.
Le cartel, qui se réunit justement la semaine prochaine (le 4 décembre) pour sa 164ème réunion, ne devrait a priori pas changer son plafond collectif de production fixé à 30 mbj depuis deux ans.
"L'Opep ne devrait pas changer sa politique avant de voir des changements significatifs des conditions de marché", prévient Anita Paluch, analyste de Varengold.
afp/jh
(AWP / 25.11.2013 13h50)