Pied-de-nez des pétroliers canadiens à Justin Trudeau
Sixième producteur de pétrole au monde, le Canada prévoit de produire 5,1 millions de barils par jour (mb/j) d'ici 2030, soit 1,2 million de barils de plus que le niveau actuel, a annoncé mardi l'Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP).
Cette production supplémentaire proviendra en totalité de l'exploitation des sables bitumineux (3,7 mb/j en 2030 contre 2,4 millions l'an dernier).
"Nous devons préparer la transition (énergétique)pour rompre notre dépendance aux énergies fossiles", avait aussi promis Justin Trudeau deux mois après avoir donné son aval à l'augmentation de capacité de deux oléoducs dans l'Ouest du pays.
Les sables bitumineux sont décriés pour le coût économique et environnemental de leur extraction. Présent sous forme sablonneuse dans le sous-sol de la forêt boréale, le pétrole est produit au terme d'un long processus polluant et énergivore.
Exporter la production de pétrole vers des marchés étrangers est l'objectif des pétroliers et le président américain Donald Trump leur a donné un coup de pouce supplémentaire en mars en donnant le feu vert à la construction de l'oléoduc Keystone XL que son prédécesseur Barack Obama avait bloqué pour des motifs environnementaux.
Plus d'oléoducs
Avec la hausse de production prévue "la capacité de transport actuelle par oléoducs", d'environ 4 mb/j est insuffisante et, selon l'ACPP il y a "un urgent besoin d'augmenter le nombre d'oléoducs vers l'est, l'ouest et le sud".
Ces projections mettent un peu plus à mal les engagements pris par Justin Trudeau à la conférence sur le climat de Paris (Cop21) de réduire de 30% les émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030 par rapport à 2005.
Les émissions de GES du secteur pétrolier et gazier représentent le quart des émissions totales au Canada, avait souligné en mars un rapport sénatorial en prévoyant que le respect de l'accord de Paris ne serait pas réalisé sans un coup d'arrêt de la production de pétrole.
"La réalisation de l'objectif fixé pour 2030 nécessitera un virage colossal des modes de production et des habitudes de consommation de l'énergie au Canada", avait noté ce rapport.
L'imposition d'une taxe carbone au tout début de l'année dans le cadre de la politique de l'environnement amorcée par le gouvernement libéral de Justin Trudeau ne suffira pas à remplir les objectifs de réduction de GES.
D'autant que la pression de l'industrie pétrolière s'accentue sur le gouvernement.
L'ACPP estime que les besoins de capacité des oléoducs doivent être de 5,5 mb/j d'ici 2030 et les seules garanties d'augmenter les capacités de deux oléoducs et la construction du Keystone XL ne suffiront pas.
Pour l'organisation écologiste Greenpeace Canada, "de nouveaux oléoducs n'ont pas leur place dans un Canada vert et sont à l'évidence inadaptés" aux priorités d'une présidence canadienne du G7 qui veut placer le climat et la croissance durable comme ses priorités.
(c) AFP