La chute des prix du pétrole, point noir pour l'économie canadienne
"Étant donné l'importance de l'industrie du pétrole dans l'économie canadienne, cette baisse aura probablement un impact négatif sur la croissance", estime la banque d'investissements Nomura. L'exploitation du pétrole des sables bitumineux et ses industries dérivées représentent 8% du produit intérieur brut (PIB) canadien.
Le Canada a produit environ 3,4 millions de barils par jour en 2014, un volume en augmentation de 36% par rapport à 2010, et se situe au 6e rang des producteurs mondiaux.
Avant la baisse de moitié du prix du baril amorcée mi-2014, la Banque du Canada prévoyait encore une croissance comprise entre 2% et 2,5% pour l'année 2015, et le Fonds monétaire international tablait sur une croissance de 2,4% en dépit du risque d'un endettement des ménages toujours élevé.
Mais avec la crainte d'un ralentissement marqué du secteur pétrolier, le gouverneur de la banque centrale, Stephen Poloz, avait ensuite abaissé d'un quart de point de pourcentage les prévisions de croissance - soit entre 1,75% et 2,25% pour 2015.
Et cela n'est peut-être pas fini: Le prix de l'or noir a poursuivi son déclin pour tomber à 54 USD le baril mardi, son plus bas depuis plus de cinq ans, une spirale encouragée par la décision des pays de l'Opep, qui pompent le tiers du pétrole mondial, de ne pas réduire leur production.
En parallèle, la demande pétrolière mondiale restera tempérée en 2015 par une activité économique moins dynamique en Chine et toujours moribonde pour la plupart des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a averti l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
Pour le Canada, le recul des prix est un handicap. "Cette baisse des prix depuis juin atteint des niveaux susceptibles de rendre l'exploitation du pétrole canadien moins rentable", prévient l'étude de Nomura en référence à des coûts de revient plus élevés pour ce pétrole extrait des sables bitumineux comparativement au brut saoudien par exemple.
"Certains investissements dans cette industrie pourraient être reportés ou annulés" car, note la banque, une baisse de 10% du prix du pétrole entraîne une baisse de 8% des investissements dans l'industrie pétrolière et gazière.
LES EXPORTATIONS, RELAIS DE CROISSANCE
Déjà des groupes pétroliers ont soit réduit la voilure, soit ralenti leurs investissements dans l'exploitation des sables pétrolifères, comme le canadien Suncor, le français Total ou le norvégien Statoil.
Les économistes de la Banque Nationale sont moins alarmistes, prévoyant une croissance pour la nouvelle année en très léger recul à 2,2% (2,5% pour la précédente estimation). La résistance de l'activité économique canadienne devrait être aidée par l'augmentation des exportations, grâce à la fois à la dépréciation du dollar canadien et à la bonne santé de l'économie du voisin américain, premier partenaire commercial du Canada.
"L'augmentation des investissements par des sociétés non énergétiques pourrait aussi compenser la baisse prévue du côté des dépenses d'investissement dans l'énergie", selon la Banque Nationale.
Autre facteur de risque pour l'économie canadienne, la consommation des ménages pourrait se tasser, d'autant que la chute des prix de l'or noir a ébranlé les marchés financiers canadiens.
Mardi, la bourse de Toronto affichait une baisse de près de 7% par rapport à son plus haut de la fin de l'été, entraînée par le plongeon au cours des trois derniers mois des valeurs pétrolières (Suncor -21%, Encana -38% ou Crecent Point Energy -43%).