Les géants du pétrole et du gaz entre attirance et prudence face à l'Iran
Nous serons bien placés pour examiner les opportunités dans le gaz, le pétrole, la pétrochimie et la distribution de carburants, mais tout cela sera sujet à de bonnes conditions contractuelles, a récemment prévenu le PDG du géant français Total, Patrick Pouyanné.
L'Iran dispose des quatrièmes réserves de pétrole au monde et des deuxièmes réserves mondiales de gaz naturel.
Avec la levée progressive et contrôlée des sanctions, le pays est amené à jouer un rôle déterminant sur le marché énergétique. Il compte accroître rapidement sa production, actuellement de 2,8 millions de barils par jour, de 600.000 à un million de barils, avec pour objectif d'en produire 4,2 millions fin 2016.
Cela risque toutefois fort de provoquer une nouvelle baisse des prix du brut, déjà très affaiblis dans un marché en excédent face à une demande molle.
La République islamique extrait aussi 600 millions de m3 de gaz par jour, presque en totalité pour sa consommation intérieure.
En tout, l'Iran espère attirer 25 milliards de dollars d'investissements pétroliers et gaziers grâce à un contrat-type plus attractif, dont les contours ont déjà été dévoilés en novembre dernier lors d'une réunion réunissant tout le gotha du secteur à Téhéran, à l'exception notable des compagnies américaines.
C'est l'élément vraiment clé, d'autant plus qu'on est dans un contexte difficile pour l'industrie pétrolière avec la chute vertigineuse des prix du pétrole, les entreprises conditionnant leurs investissements à des critères de rentabilité draconiens, insiste M. Perrin.
- Avantage aux Européens
Ce contrat permettra aux sociétés étrangères d'être parties prenantes à la phase de production et non plus seulement à celle d'exploration, mais dans le cadre de coentreprises détenues à 51% par un partenaire iranien.
Selon l'expert, le faible prix du baril pourrait inciter les majors internationales à se montrer plus dures dans les négociations qui s'ouvriront après des appels d'offres ou en bilatéral, face à des interlocuteurs iraniens connus pour leur fermeté et peu enclins à brader leurs intérêts nationaux, même si le pays semble désireux d'avancer vite pour développer ses infrastructures énergétiques.
On est dans une phase délicate, marquée par encore pas mal d'incertitudes. C'est aussi un sujet très chaud politiquement: les compagnies restent assez discrètes par rapport à l'Iran pour ne pas fâcher d'autres pays du Moyen-Orient, notamment l'Arabie saoudite et ses alliés sunnites qui ont rompu ou réduit leurs relations diplomatiques avec ce pays chiite.
Dans cette équation complexe, les grands groupes européens sont les mieux placés, particulièrement Total et l'italien ENI, qui ont gardé une représentation dans le pays durant toute la durée des sanctions. L'anglo-néerlandais Shell a aussi laissé de bons souvenirs, selon M. Perrin.
Les Etats-Unis, qui n'ont plus de relations diplomatiques avec la République islamique depuis plus de 35 ans, devraient rester un peu à la traîne.
Les compagnies européennes auront aussi un avantage sur les entreprises asiatiques, qui ont pu travailler sous les sanctions. L'Iran a constaté que ce n'étaient pas toujours les meilleures, affirme Francis Perrin. Les compagnies asiatiques et russes auront une place, mais sur certaines projets jugés particulièrement importants, stratégiques et complexes, l'Iran sera tenté de privilégier les compagnies européennes, de par leur savoir-faire et leur expertise.
Pour les compagnies russes, l'enjeu est à double tranchant puisque l'arrivée d'une offre de gaz et pétrole plus abondante sur le marché mondial les concurrencera sérieusement, notamment sur leur marché de prédilection qu'est l'Europe.
(c) AFP