Face à des prix du pétrole dopés par la guerre, l'impuissance de l'Opep+
Face à l'escalade de ces derniers jours déclenchée par la Russie, l'un des piliers du cartel, l'Arabie saoudite a réaffirmé dimanche soir son attachement à l'alliance.
Créée en 1960 avec le but de réguler la production et le prix du brut, en instaurant des quotas, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) rassemble treize membres, menés par Ryad, et s'est étendue en 2006 à dix partenaires, guidés par Moscou, pour former l'OPEP+.
"En période de volatilité extrême des prix du pétrole, c'est à l'OPEP+ qu'il revient de rétablir le calme", rappelle Stephen Brennock, analyste chez PVM Energy.
Une mission inscrite dans ses statuts, comme étant celle de "coordonner et d'unifier les politiques pétrolières de ses pays membres et d'assurer la stabilisation des marchés".
Depuis le début de la pandémie de Covid-19, les 23 membres se retrouvent quasi mensuellement pour ajuster le plus finement possible leur offre de brut.
Leur stratégie de coupes drastiques pour endiguer la chute des cours a fait ses preuves mais maintenant qu'il faut rouvrir les robinets, le mécanisme semble grippé.
Des Etats défaillants
Entre décembre et janvier, les pays membres de l'OPEP+ ont augmenté leur production de 64.000 barils par jour, selon des sources indirectes citées dans le dernier rapport mensuel du groupe.
Un résultat très loin de la hausse de 400.000 barils convenue chaque mois depuis le début de la stratégie de réouverture prudente des vannes, amorcée en mai 2021 par l'OPEP+ face à la reprise.
"Le Covid a touché le plus durement les économies africaines, et le Nigeria et l'Angola ont eu du mal à maintenir les investissements dans les infrastructures, tant pour les puits existants que pour les nouveaux puits", explique à l'AFP Edward Moya, analyste pour Oanda.
"Des années de sous-investissement et d'instabilité politique se sont traduites par une capacité de réserve très limitée" dans ces pays, confirme Han Tan, analyste chez Exinity.
En janvier, le Congo et la Guinée équatoriale ont également produit nettement moins que prévu.
Selon Carsten Fritsch, cité dans une note de Commerzbank, "l'écart entre la production convenue et la production réelle de l'OPEP+ risque de se creuser" encore, à moins que l'Arabie saoudite et d'autres pays aux capacités de réserve inutilisées ne viennent à la rescousse.
Les jokers Arabie saoudite et Iran
Ryad avait affirmé au début de l'année que le respect des termes de l'accord de l'OPEP+ et des plafonds était essentiel. En d'autres termes, les membres disposant d'une marge de manoeuvre ne doivent pas intervenir pour compenser le non-respect par certains des quotas fixés.
En outre, "pour l'instant, il ne semble pas y avoir de volonté d'assouplir les conditions du marché, les producteurs capitalisant sur des prix élevés qu'ils ne jugent pas trop dommageables pour l'économie après des années de prix très bas", souligne Craig Erlam, d'Oanda.
Sur un autre front, les discussions se poursuivent à Vienne sur le dossier nucléaire iranien. En cas d'accord, les sanctions internationales qui visent Téhéran seraient levées.
Cela permettrait de "débloquer les exportations iraniennes dans les semaines à venir, ce qui ajouterait environ 800.000 barils d'approvisionnement supplémentaire par jour", détaille Ipek Ozkardeskaya, analyste de la banque Swissquote.
La participation au marché de l'Iran, membre fondateur de l'OPEP, est fortement limitée depuis 2018 et le rétablissement des sanctions économiques par l'administration de Donald Trump.
Un retour à pleine capacité pourrait ainsi renverser l'état actuel de l'offre mondiale d'or noir, et considérablement freiner l'envolée des prix.
(c) AFP