Sourde à l'appel des pays consommateurs, l'Opep+ suit sa ligne
La production mensuelle de l'alliance "sera ajustée à la hausse de 400.000 barils par jour pour le mois de décembre", a annoncé l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) dans un communiqué publié à l'issue d'un sommet réunissant ses treize membres et leurs dix alliés via l'accord OPEP+.
Cette stratégie, favorable aux caisses des producteurs, laisse à l'heure actuelle une réserve de plus de 4 millions de barils sous terre chaque jour.
Le marché, très nerveux depuis le début de la semaine, basculait dans le rouge peu avant 15H30 GMT: le baril de WTI WTI Le West Texas Intermediate (WTI), aussi appelé Texas Light Sweet, est une variation de pétrole brut faisant office de standard dans la fixation du cours du brut et comme matière première pour les contrats à terme du pétrole auprès du Nymex (New York Mercantile Exchange), la bourse spécialisée dans l'énergie. perdait 0,64% à 80,34 dollars et le Brent BRENT Le Brent ou brut de mer du nord, est une variation de pétrole brut faisant office de référence en Europe, coté sur l'InterContinentalExchange (ICE), place boursière spécialisée dans le négoce de l'énergie. Il est devenu le premier standard international pour la fixation des prix du pétrole. lâchait 0,07% à 81,93 dollars, une illustration de l'adage "achetez la rumeur, vendez la nouvelle" ("buy the rumor, sell the fact" en anglais).
La Maison Blanche a rapidement manifesté son mécontentement: "la reprise ne devrait pas être fragilisée par un déséquilibre entre l'offre et la demande. L'Opep+ semble ne pas vouloir utiliser sa capacité et son pouvoir (sur l'offre d'or noir) à ce moment crucial de la reprise mondiale", a déploré un porte-parole du Conseil de sécurité nationale.
"Le marché est plein de rumeurs sur une potentielle initiative coordonnée de puiser dans les réserves stratégiques de pétrole afin de combattre la hausse des prix", a résumé John Kilduff, analyste pour la firme de conseil en investissements Again Capital, évoquant les Etats-Unis mais aussi le Japon et les pays de l'OCDE.
"La reprise ne devrait pas être fragilisée par un déséquilibre entre l'offre et la demande. L'Opep+ semble ne pas vouloir utiliser sa capacité et son pouvoir (sur l'offre d'or noir) à ce moment crucial de la reprise mondiale", a encore déploré le porte-parole du Conseil de sécurité nationale.
Dans le doute s'abstenir
Si le doute subsistait encore ça et là parmi les observateurs du marché, les membres de l'OPEP+ avaient distillé plusieurs indices allant dans le sens de cette décision ces derniers jours."La crise est en quelque sorte contenue mais elle n'est pas encore terminée, nous devons faire attention à ne pas prendre les choses pour acquises", affirmait ainsi fin octobre le ministre saoudien de l'Energie Abdelaziz ben Salmane, chef de file de l'OPEP.
Le secrétaire général de l'OPEP Mohammed Barkindo avait souligné la semaine dernière "la nécessité de rester prudent et attentif à une situation de marché en constante évolution", une rhétorique désormais habituelle au sein de l'alliance.
Le cartel insiste sur les facteurs de risque planant sur la demande afin de justifier le maintien de sa politique prudente, évoquant aussi les - bien réels - nouveaux pics de contaminations au Covid-19 observés en Russie et en Chine.
Le vice-Premier ministre russe Alexandre Novak, en charge du pétrole, a d'ailleurs insisté jeudi sur la menace du Covid-19 qui plane toujours sur la demande de pétrole, à l'occasion d'une conférence de presse qui s'est tenue après le sommet.
Cette attitude prudente permet également de ménager une place à l'un de ses membres aujourd'hui exclu du marché, l'Iran, dont les barils pourraient revenir sur le marché à moyen-terme.
Plusieurs observateurs ont par ailleurs partagé leurs doutes sur la capacité de certains membres du cartel à pouvoir augmenter davantage leur production, les installations de forage ayant souffert pendant la pandémie de retards d'entretien et de maintenance.
Grogne des consommateurs
"Les prix supérieurs à 80 dollars le baril sont, bien entendu, une autre raison pour laquelle l'OPEP+ n'est pas pressée d'augmenter l'offre sur le marché", note Caroline Bain, analyste de Capital Economics.S'il précise que l'OPEP+ conserve "la marge nécessaire pour réagir en cas de forte reprise", M. Novak et ses partenaires sont pour l'instant restés sourds aux appels des pays consommateurs en faveur d'une augmentation plus franche de la production.
Le fait que "la Russie, l'Arabie saoudite et d'autres grands producteurs ne pompent pas davantage de pétrole (...) n'est pas juste", a par exemple déploré dimanche soir le président américain Joe Biden, en marge du sommet du G20 à Rome, visant directement l'OPEP+.
Interrogé sur le sujet, M. ben Salmane a convenu de "discussions à tous les niveaux" avec les États-Unis et affirmé "qu'il croyait toujours que le groupe faisait ce qu'il fallait faire".
La prochaine réunion de l'OPEP+ est programmée le 2 décembre, a annoncé l'Organisation sur son site internet.
(c) AFP