Chute des prix du pétrole et coronavirus: double peine pour l'économie du Golfe
Depuis début mars, les sept Bourses de la région ont connu, à l'image des autres places boursières dans le monde, une descente aux enfers, les marchés de Dubaï et d'Abou Dhabi ainsi que celui du Koweït perdant plus d'un tiers de leur valeur.
Le marché saoudien, le plus gros de la région et l'un des dix premiers du monde, a lui chuté d'environ 18% sur la même période.
L'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar et Oman ont annoncé des mesures destinées à soutenir leur économie pour un montant total de quelque 85 milliards de dollars, dont une partie est destinée à soutenir les marchés boursiers.
L'agence de notation Moody's a estimé que le plan de relance de 27,2 milliards de dollars d'Abou Dhabi serait utile dans la mesure où il "limiterait" les dégâts pour les banques émiraties et notamment l'impact du coronavirus sur la valeur de leurs actifs matériels (immobilier par exemple).
Deuxième coup dur
Les recettes publiques des six nations du Conseil de coopération du Golfe (CCG - Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Oman, Qatar et Koweït) dépendent par ailleurs fortement du pétrole, dont la demande a baissé dès le début de la propagation de l'épidémie en Chine, qui absorbe habituellement un cinquième de la production de la région.Deuxième coup dur pour ces pays: l'absence d'accord entre l'Opep et la Russie sur une réduction supplémentaire de la production pétrolière pour soutenir les cours dont la tendance était déjà à la baisse, ce qui a déclenché une guerre des prix entre Ryad et Moscou.
L'Arabie saoudite a ainsi fortement baissé ses prix, inondant le marché de barils à bas coût. Les cours ont plongé depuis, atteignant mercredi leur plus bas niveau en 18 ans, avec un baril de Brent à environ 25 dollars, ce qui équivaut à des pertes de dizaines de milliards de dollars pour le Golfe.
"Dubaï est la plus vulnérable et cela pourrait à terme réveiller les craintes concernant la dette énorme de l'émirat", estime le groupe de réflexion basé à Londres dans un rapport.
La cité-Etat, qui a accueilli 16,8 millions de touristes l'année dernière, tire plus de 90% de ses revenus de l'immobilier, du tourisme, de l'aviation et du commerce. Elle visait initialement cette année les 20 millions, notamment grâce à la tenue de l'Exposition universelle 2020.
Soutien d'urgence
L'Association internationale du transport aérien (IATA) a appelé jeudi les gouvernements du Moyen-Orient à apporter un soutien d'urgence aux compagnies aériennes qui luttent pour leur survie.De nombreuses liaisons au Moyen-Orient et en Afrique ont été suspendues et la demande a chuté de 60% sur les lignes encore en service, selon l'organisation.
Selon l'IATA, la contribution du transport aérien aux économies du Moyen-Orient, principalement dans le Golfe, est estimée à 130 milliards de dollars par an, soit 4,4% du PIB, et à 2,4 millions d'emplois.
Les gouvernements sont sous pression. L'Arabie saoudite, premier exportateur de brut, a décidé mercredi de réduire ses dépenses pour 2020 de 5%, soit 13,3 milliards de dollars de moins sur les 272 milliards de dollars prévus.
Selon Capital Economics, l'impact combiné du coronavirus et de l'effondrement des prix du pétrole augmentera le déficit budgétaire saoudien en 2020, le faisant passer de 6,4% à 16% du PIB.
La Commission économique et sociale des Nations unies pour l'Asie occidentale affirme pour sa part que les pays arabes perdent environ 550 millions de dollars par jour en raison de la chute des prix du pétrole et que la crise liée au coronavirus pourrait détruire jusqu'à 1,7 million d'emplois cette année dans la région.
(c) Afp