Washington conforte sa place dans la cour des grands du pétrole
La production américaine de brut a atteint en moyenne 10,038 millions de barils par jour (mbj) en novembre, selon des chiffres de l'Agence américaine d'information sur l'Energie (EIA) diffusés mercredi sans toutefois bouleverser complètement le marché mondial.
Ce niveau s'inscrit tout juste sous le pic de novembre 1970 (10,44 mbj), avant que la production ne se replie progressivement pour descendre sous les 4 mbj en 2008.
Depuis, ces deux pays se sont engagés à limiter leur production dans le but de restreindre l'offre sur le marché mondial et ainsi tenter de redresser les prix.
Cet objectif a été atteint: le baril de Brent coté à Londres, la référence, s'est hissé la semaine dernière au-dessus des 70 dollars pour la première fois depuis 2014.
Les producteurs américains, qui depuis dix ans utilisent les nouvelles techniques de fracturation hydraulique et de forage horizontal pour exploiter de nouveaux bassins de schiste, en ont largement profité pour accélérer leur activité.
De quoi réjouir le président Trump, qui a assuré en juin vouloir non seulement atteindre l'indépendance énergétique mais aboutir à la "domination américaine en matière d'énergie".
Dans son discours sur l'état de l'Union mardi, il a affirmé que son administration avait, en supprimant des réglementations, "arrêté de faire la guerre à l'énergie américaine".
Moins vulnérable
L'envolée de la production américaine signifie-t-elle que les Etats-unis ont pris la place de l'Arabie saoudite, chef de file de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), sur le marché mondial ? Non, selon Samantha Gross, spécialiste des relations internationales et des politiques énergétiques à la Brookings Institution.
Certes les Etats-Unis sont devenus un acteur majeur, notamment grâce à la capacité des entreprises américaines à s'adapter rapidement aux évolutions des prix du pétrole. Et en forant à plein au moment où Ryad et Moscou se contraignent à réduire leur production, elles ont gagné des parts de marché.
"Sur la scène internationale, le pays est certainement moins vulnérable qu'il a pu l'être par le passé", remarque Mme Gross auprès de l'AFP. "Mais il reste un importateur net de pétrole, contrairement à l'Arabie saoudite ou à la Russie."
Surtout, alors que Ryad dirige directement la stratégie pétrolière du pays via l'entreprise publique Aramco, Washington n'a pas vraiment son mot à dire dans les décisions prises, sur des critères purement économiques, par les dizaines de compagnies privées qui opèrent aux Etats-Unis.
Prix à la pompe
Depuis son arrivée au pouvoir Donald Trump a fait preuve de son soutien à l'industrie.
"En éliminant des réglementations, il est devenu plus facile et plus rapide de préparer des forages sur des terrains publics", note ainsi James Williams de WTRG, spécialiste de l'industrie du pétrole.
"L'administration a aussi fait avancer des dossiers sur les oléoducs, ce qui est un élément majeur en termes d'infrastructures", ajoute-t-il.
Début janvier, Washington a fait part de son intention d'ouvrir la quasi-totalité des eaux littorales des Etats-Unis à l'exploitation du pétrole et du gaz offshore.
"Mais tout cela n'a pas d'impact immédiat", relève M. Williams.
Les tendances sur les marchés de l'énergie étaient déjà à l'oeuvre sous l'administration Obama, permettant par exemple au pays de redevenir en 2017 un exportateur net de gaz.
Même si les Etats-Unis parvenaient à exporter plus de pétrole qu'ils n'en importent dans les années qui viennent, "cette idée que nous pourrions être isolés du reste du marché mondial est un mirage", estime Mme Gross.
"Si un conflit devait émerger au Moyen-Orient, cela ferait grimper partout les cours du brut et se répercuterait dans les prix payés à la pompe par les automobilistes américains", assure-t-elle.
(c) AFP