Pétrole: l'Arabie a assoupli sa position pour favoriser l'accord d'Alger
Chef de file de l'OPEP, Ryad s'opposait depuis deux ans à une réduction de la production, invoquant la défense de ses parts de marché dans un environnement concurrentiel.
Mais lors d'une réunion informelle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) mercredi à Alger, l'Arabie saoudite a accepté, pour parvenir à un accord, que l'Iran, son grand rival, ainsi que le Nigeria et la Libye, deux pays frappés par des violences, soient exemptés d'une telle mesure.
Mais des analystes relèvent que le royaume est de loin bien mieux placé que les autres pays producteurs pour résister à l'effondrement des cours du brut, grâce à ses énormes réserves en devises et à une dette limitée.
Il n'y a pas de changement majeur dans la stratégie pétrolière saoudienne, a ainsi déclaré Spencer Welch, consultant de ISH Energy.
L'Arabie saoudite n'a pas été obligée de changer de politique, a-t-il ajouté, rappelant à l'AFP que Ryad s'était dit prêt à un accord si d'autres membres du cartel s'impliquaient.
Après six heures de réunion et des semaines de tractations, l'OPEP a décidé mercredi de ramener sa production à un niveau de 32,5 à 33 millions de barils par jour (mb/j), contre 33,47 mb/j en août, selon le chiffre de l'Agence internationale de l'Energie (AIE).
Il s'agit de la réduction la plus importante depuis celle décidée en 2008, quand le baril était passé de près de 150 dollars à près de 40.
- Opposition assouplie
Mais nous sommes d'avis que le royaume continuera de tolérer des prix pétroliers bas et [va] poursuivre une austérité budgétaire pour s'y adapter.
Ryad a accusé l'an dernier un déficit budgétaire record de 98 milliards de dollars et prévoit 87 milliards de déficit en 2016.
Depuis la mi-2014, l'Arabie saoudite a puisé quelque 170 milliards de dollars dans ses réserves, tombées fin juillet à 560 milliards de dollars.
Après avoir augmenté les prix du carburant, de l'électricité, de l'eau et autres services publics, Ryad a décidé cette semaine de réduire jusqu'à 20% les salaires des ministres et les émoluments des membres du Conseil consultatif.
Le royaume est par ailleurs engagé dans une guerre coûteuse au Yémen et impliqué dans les tensions régionales en Syrie et en Irak.
L'Arabie saoudite a des réserves de plus de 500 milliards de dollars et une dette très limitée. Ainsi, elle est bien mieux placée que la plupart des autres pour faire face à des prix du pétrole bas, souligne M. Welch.
Pour un ancien responsable pétrolier saoudien, Mohammad al-Sabban, l'accord d'Alger ne change pas beaucoup les niveaux de la production saoudienne, même si le royaume réduit ses extractions de 500.000 b/j.
Cela ne fera que ramener la production saoudienne à son niveau de janvier, tel que proposé aux pourparlers pétroliers infructueux tenus en avril à Doha, a-t-il expliqué sur la BBC.
Au cours des derniers mois, le royaume a porté sa production à un niveau record de 10,7 mb/j, contre 10,2 mb/j au début de l'année.
L'analyste koweïtien Kamel al-Harami admet que l'impact économique de la chute des prix avait favorisé l'accord d'Alger, mais qu'en facilitant l'accord, l'Arabie avait marqué un point politique important.
Elle a montré qu'elle contrôlait encore l'OPEP. Elle y a réaffirmé son leadership, a-t-il dit à l'AFP. Elle a fait des concessions, non seulement à l'Iran, mais aussi au Nigeria et à la Libye.
(c) AFP