Le Congrès américain abroge l'interdiction d'exporter du pétrole
Le gros projet de loi budgétaire en cours adopté vendredi par le Congrès prévoit notamment qu'aucun responsable du gouvernement fédéral ne pourra imposer ou faire respecter des restrictions à l'exportation de pétrole brut.
Autre argument invoqué par Heidi Heitkamp, sénatrice démocrate de l'Etat du Dakota du Nord (nord) saisi par la fièvre du pétrole de schiste: En ouvrant le brut américain au reste du monde, nous fournirions à nos alliés un partenaire commercial plus stable, et réduirions le pouvoir de pays comme la Russie, le Venezuela et des régions volatiles du Moyen-orient qui utilisent leur domination (sur le marché de) l'énergie pour influencer notre pays et nos alliés.
Pour les écologistes, il s'agit d'un nouvel encouragement à pomper du pétrole, au mépris des engagements pris au début du mois à la conférence sur le climat (COP21) de Paris.
Des sources d'énergie sales et dangereuses doivent rester dans le sol, ont fait valoir les Amis de la Terre.
Cette organisation a évoqué également les risques posés par l'acheminement du brut vers de nouvelles destinations, qui va augmenter la fréquence des explosions de train et des fuites de pétrole dans le pays et les eaux internationales.
- En plein choc pétrolier
L'embargo remonte au choc pétrolier de 1973-1975, lorsque les Etats-Unis, dont la production de pétrole était en déclin, voulaient se protéger d'une possible rupture des approvisionnements. Ils avaient décidé de constituer une réserve stratégique de brut, et d'interdire l'exportation de la production nationale.
Désormais, plus aucune restriction légale ne pèsera sur les exportations des quelque 9,2 millions de barils par jour produits par les Etats-Unis, ou des 490,7 millions de barils de brut commercial stockés dans le pays.
Le président américain pourra seulement limiter les exportations pour des raisons de sécurité nationale, en cas de pénurie, ou si les cours du pétrole aux Etats-Unis viennent à dépasser très largement les prix pratiqués sur le marché mondial, au risque de peser sur l'emploi.
Cette mesure a été favorisée par la spectaculaire envolée de la production américaine de brut ces dernières années, qui a permis à l'Agence internationale de l'énergie (AIE) de prédire que les Etats-Unis pourraient être exportateurs nets de brut dans une quinzaine d'années.
A 281,68 millions de barils par mois (en septembre 2015, selon les chiffres du ministère américain de l'Energie), elle se rapproche de son record d'octobre 1970 (310,40 millions de baril), et elle a presque doublé depuis octobre 2008 (146,93 millions de barils).
Pour James Williams, de WTRG Economics, la levée de l'interdiction d'exporter ne devrait avoir que peu d'impact sur le marché mondial du pétrole, car au total, il n'y aura pas de quantité de pétrole supplémentaire en vente.
Mais comme l'a noté Andy Lipow, de Lipow Oil Associates, les exportations seront difficiles si l'écart de prix entre les variétés du WTI américain et du Brent européen, coté à Londres, se resserre encore: cela n'encourage pas les exportations américaines vers de nombreux pays, une fois pris en compte le coût additionnel du transport.
(c) AFP