Après l'Angleterre, Total va s'attaquer au raffinage en France
Total a annoncé jeudi une réduction de moitié de la capacité de raffinage de son site anglais de Lindsey, qu'il avait en vain tenté de revendre dans le passé, avec à la clé 180 suppressions de postes sur 580.
Mais la bonne nouvelle, c'est que le site est sauvé. La raffinerie de Lindsey sera certes plus petite, mais ce sera une raffinerie plus convertissante et plus rentable, explique à l'AFP le patron de la branche raffinage-chimie du premier raffineur européen, Philippe Sauquet.
Depuis plusieurs mois, à coup d'interviews dans la presse, les dirigeants de Total ont prévenu qu'une réorganisation de leur outil de raffinage en Europe était inévitable, face à la surcapacité chronique du secteur.
La capacité excédentaire est évaluée entre 1,5 à 2 millions de barils par jour (mbj) sur un total d'environ 14 mbj, soit l'équivalent d'une dizaine de raffineries.
Le secteur, dont certains sites tournent à perte, est pris en étau entre une demande intérieure déclinante et une concurrence croissante du Moyen-Orient et de l'Amérique du Nord, où les coûts sont moindres et les normes environnementales moins contraignantes.La France ne sera pas épargnée, où les cinq raffineries exploitées par le groupe emploient environ 3.800 personnes et perdent 200 millions d'euros par an, dont 150 millions pour le seul site de La Mède (Bouches-du-Rhône), en difficulté comme celui de Donges (Loire-Atlantique).
Le raffinage hexagonal souffre aussi d'une production structurellement inadaptée à la demande: les raffineries produisent trop d'essence et pas assez de gazole, un carburant qui représente plus de 80% des volumes écoulés dans les stations-service du pays.
- Annonces en avril -
Comme par le passé, il pourra y avoir des réductions de postes, mais aucun licenciement, assure M. Sauquet. Pour nous, il est essentiel, si nous réduisons les capacités et le nombre de postes sur certains sites, de le faire en essayant de minimiser l'impact social et en redéveloppant un tissu industriel qui permette de reclasser tout le monde.
Total devrait présenter son plan pour l'Hexagone au mois d'avril. Mais pas question de fermeture de site comme celle de la raffinerie des Flandres, à Dunkerque (Nord), arrêtée en 2010: le groupe envisage plutôt des reconversions industrielles.
On a plutôt en tête le modèle qu'on a fait dans le domaine de la pétrochimie pour Carling où il y a eu des investissements, des réductions de capacités, mais pas de fermeture de site, détaille le dirigeant en rappelant la transformation de cette plateforme pétrochimique en centre européen de production de résines d'hydrocarbures, qui s'accompagne toutefois de la suppression de 210 emplois.
Nous voulons développer de nouvelles activités, bien sûr. On souhaite que ce soit des activités d'avenir dans le domaine énergétique, poursuit-il, citant notamment les biocarburants, seul ou en partenariat. Total produit déjà des biocarburants. A l'avenir, il sera peut-être question d'en faire un peu plus.
La chute de plus de 50% des cours de l'or noir, matière première des raffineries, n'offre qu'un répit temporaire au secteur. Il y a un tout petit effet sur la demande, mais il est limité. La forte concurrence fait que les marges vont s'adapter. Cela ne change absolument pas notre vision stratégique sur le long terme et cela ne remet pas en cause ce que nous proposerons au printemps, insiste Philippe Sauquet.
Le complexe de Gonfreville-l'Orcher (Seine-Maritime) devrait être épargné: il figure parmi les six grandes plateformes intégrées (raffinage-pétrochimie) considérées comme clés par Total, avec Anvers (Belgique), Jubail (Arabie saoudite), Daesan (Corée du Sud), Ras Laffan (Qatar) et Port Arthur (Etats-Unis).
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