Total poursuit sur deux sites français sa restructuration dans le raffinage
Le plan présenté jeudi matin aux syndicats prévoit d'arrêter fin 2016 le traitement de pétrole brut lourdement déficitaire à La Mède, et d'y développer, via un investissement de 200 millions d'euros, d'autres activités, comme la production de biocarburants.
Il comprend aussi 400 millions d'euros d'investissements sur le site de Donges, également déficitaire de près de 50 millions d'euros par an, pour permettre à cette raffinerie de produire des carburants moins soufrés conformes aux normes européennes.
C'est un plan résolument tourné vers l'avenir et extrêmement ambitieux parce que 600 millions d'euros, c'est un effort absolument majeur notamment à une époque où les groupes pétroliers sont plutôt en train de réduire la voilure, a assuré à l'AFP Philippe Sauquet, patron de la branche raffinage-chimie du groupe.
L'objectif est de rétablir, une fois la transformation achevée, la rentabilité des deux sites, avec une amélioration (...) de 150 millions d'euros des résultats du groupe en France visée chaque année, a affirmé à la presse le directeur général de Total, Patrick Pouyanné.
Nous démontrons notre engagement pour faire vivre l'industrie lourde en France et en Europe, a-t-il ajouté.
A La Mède, qui a subi des pertes 150 millions d'euros par an ces dernières années, cette transformation entraînera la suppression de 180 postes sur 430, mais sans aucun licenciement, d'après la direction du géant pétrolier, qui évoque un recours pour moitié à des départs en retraite, des mesures d'âges y compris des retraites anticipées, et des reclassements du personnel non cadre dans la même région.La direction de La Mède doit présenter le plan à ses salariés lors d'un comité d'entreprise vendredi.
La CGT de la raffinerie a jugé ces suppressions de postes inacceptables et a entamé une grève ce jeudi à 04H00, qui paralyse les expéditions de tous les produits sortant du site, selon un de ses représentants, Rachid Medhi.
Interrogé à propos de cette grève, Patrick Pouyanné a estimé qu'un certain syndicat ait envie de mobiliser l'équipe de La Mède (...) n'est pas complètement anormal, après, laissons le dialogue s'instaurer et on répondra aux inquiétudes des gens. Avant d'ajouter: la raffinerie fonctionne normalement, ceci étant, il est normal que les gens s'expriment.De son côté, la CFDT, premier syndicat du groupe, a assuré qu'elle soutiendra tout projet durable mais ne cautionne aucune perte d'emploi.
Khalid Benhammou, coordinateur CFE-CGC, estime quant à lui qu'à La Mède, c'est moins pire que ce qu'on craignait, et que la modernisation de Donges est une très bonne nouvelle.
Un des enjeux sera le coût du volet social du plan, qui reste à négocier mais qui ne sera pas négligeable, selon Philippe Sauquet.
- 20% de capacités en moins en Europe en 2017 -
Avec l'arrêt de l'activité de raffinage classique à La Mède, Total ne disposera plus que de quatre sites de traitement de pétrole brut en France, employant environ 3.600 personnes.
Ces dernières années, Total a déjà restructuré deux sites en France, en 2010 à Dunkerque (Nord) et en 2013 à Carling (Moselle), avec environ 350 emplois supprimés. Il a parallèlement investi plus d'un milliard d'euros en 2012 sur sa plateforme de raffinage de Normandie, à Gonfreville-L'Orcher (Seine-Maritime), qu'il considère aujourd'hui comme un de ses six sites clés dans le monde.
Pour Total, l'objectif est de s'adapter à la crise structurelle du secteur du raffinage en Europe, qui souffre depuis plusieurs années de surcapacités, évaluées entre 1,5 à 2 millions de barils par jour, soit l'équivalent d'une dizaine de raffineries.
Le secteur fait en effet face à une baisse de la demande en Europe pour les produits pétroliers (-15% depuis 2008 selon Total), à laquelle s'ajoute la concurrence des raffineries américaines, asiatiques et du Moyen-Orient, aux coûts biens moins élevés.
Ainsi, une fois modernisée, Donges produira des carburants adaptés aux évolutions des normes européennes, ce qui la rendra moins dépendante des exports, a assuré M. Sauquet.
Le groupe veut au final réduire de 20% d'ici 2017 ses capacités dans le raffinage/chimie, projet qui sera mené à bien selon le groupe avec le plan annoncé ce jeudi en France.
Conséquence: il n'y a pas d'autre opération structurelle à attendre sur cette période sur nos sites européens, a prévenu M. Sauquet.
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(c) AFP