Après Shell et BG Group, vers un mouvement de concentration dans le secteur pétrolier?
La dernière fois que l'on a vu des opérations de cette taille c'était en 1998 lorsque Exxon et Mobil ont fusionné pour 73 milliards de dollars ou que BP a racheté Amoco pour 48,2 milliards de dollars, relève Michael Hewson, analyste chez CMC Markets.
Peu après, Total - alors Totalfina - fusionnait avec Elf pour devenir une des majors du secteur.
Le point commun entre ces deux périodes: la brutale chute des cours du brut. S'ils ne sont pas tombés à moins de 20 dollars le baril comme il y a 15 ans, les prix de l'or noir ont perdu plus de 60% depuis l'été dernier et évoluent à moins de 50 dollars.
Dans ce contexte, les compagnies pétrolières ont vu leurs marges se réduire et ont annoncé ces derniers mois une réduction de leurs investissements.
Les premières victimes de ce serrage de ceinture ont été les sociétés de services pétroliers où les grandes manoeuvres ont déjà commencé.L'américain Halliburton a racheté son compatriote Baker Hugues, Schlumberger est en passe d'acquérir 45,6% du russe EDC, sans parler de la tentative avortée du français Technip de s'emparer de CGG.
Beaucoup de pétroliers pensent que l'on va rentrer dans une période plutôt longue de prix de pétrole relativement bas et donc l'idée de faire des fusions est motivée par la volonté d'avoir des économies d'échelle et des synergies, explique Colette Lewiner, experte du secteur de l'énergie chez Capgemini.
Shell compte ainsi réaliser 2,5 milliards de dollars de synergies avec l'acquisition de BG.
Ces opérations sont favorisées par la baisse des capitalisations boursières de nombreuses sociétés moyennes dans la foulée de la chute des cours, rendant des acquisitions moins onéreuses.
Une opportunité renforcée par la baisse des taux d'intérêt, notamment en Europe sous l'action de la Banque centrale européenne et qui peut favoriser le financement de ces opérations, note Guy Maisonnier, économiste au centre de recherche IFP Energies Nouvelles.
- les réserves dans le viseur -
Les compagnies se sont habituées à un prix de 100 dollars le baril et beaucoup ont besoin d'un prix entre 40 et 60 dollars pour être à l'équilibre, donc nous pourrions voir d'autres opérations du genre de celle de Shell et BG Group, estime Christian Stadler, chercheur à la Warwick Business School.
Pour les compagnies productrices, l'enjeu est également d'acquérir de nouvelles réserves à moindre coût alors que l'exploration demande des investissements colossaux.
Certaines compagnies moyennes ont des réserves qu'elles n'ont parfois pas les moyens de développer car pour un dollar en exploration, il en faut 10 pour développer la production, explique Colette Lewiner.
Grâce à l'acquisition de BG Group, Shell va ainsi augmenter d'un coup ses réserves de pétrole et de gaz de 25%.
Si un mouvement de concentration a peu de chance d'engendrer de nouvelles méga-fusions comme à la fin des années 90 car les grandes compagnies ont déjà atteint des tailles importantes, avance Guy Maisonnier, il pourrait surtout toucher des sociétés moyennes, comme la multitude d'opérateurs dans les gaz et pétrole de schiste aux Etats-Unis, qui souffrent particulièrement de la chute des cours.
Outre des rapprochements entre acteurs, des prises de participations de fonds d'investissements sont également prévisibles, estiment les experts. Le gérant d'actifs Carlyle vient par exemple de lever 2,5 milliards de dollars pour investir dans le pétrole et le gaz hors des Etats-Unis.
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(c) AFP