Condamnations requises au procès pétrole contre nourriture II
Le procureur a sollicité des condamnations de la part du tribunal correctionnel de Paris, tout en admettant n'avoir aucun argument nouveau par rapport au premier procès, conclu en juillet 2013 par une relaxe générale des prévenus -dont le groupe pétrolier Total ou l'ancien ministre Charles Pasqua- contre laquelle le parquet a fait appel.
Le procureur a d'ailleurs reconnu que le parquet s'était tiré une balle dans le pied en prenant la décision totalement absurde de tenir le procès de ce deuxième volet avant le jugement en appel du premier, prévu en octobre.
Il a également admis qu'il n'y avait eu aucun enrichissement personnel côté irakien, ce qui est une des conditions du délit de corruption et était une motivation de la décision de relaxe au premier procès. La décision de surtaxer les contrats a en effet été prise par un Etat souverain et les sommes atterrissaient à la banque centrale irakienne. Par ailleurs, les autorités françaises étaient au courant, la plupart des sociétés s'étant tournées vers les autorités diplomatiques françaises avant d'accepter les conditions irakiennes.
Toutefois, au nom de la cohérence de l'interprétation juridique du parquet, il a donc requis des condamnations et souligné qu'en cas de relaxe le parquet ferait de nouveau appel, car seules les cours supérieures (pourront) trancher enfin cette problématique qui se posera en cas de nouvelle violation des règles d'un embargo international, délit qui n'existe pas en tant que tel.
Premier défenseur à plaider, Me Rémy Douarre a fustigé un naufrage judiciaire, taxant le parquet d'acharnement. L'Etat français a encouragé ces entreprises à aller prendre des marchés en Irak, on a laissé faire, on a couvert, a-t-il lancé, dénonçant le procès comme une escroquerie intellectuelle et juridique. Vous n'avez pas la compétence pour juger les décisions d'un Etat souverain, a-t-il dit aux juges.Pétrole contre nourriture, programme de l'ONU en vigueur de 1996 à 2003, encadrait des ventes d'hydrocarbures censées financer des importations devant répondre aux besoins humanitaires de la population, alors que le pays était soumis à un embargo strict suite à l'invasion du Koweït en 1991.
Mais le régime irakien avait mis rapidement en place un système occulte de surfacturation: les sociétés étrangères souhaitant bénéficier du programme devaient surévaluer leurs factures de 10%, sommes qualifiées de frais de transport ou service après-vente et en réalité reversées par des circuits parallèles dans les caisses du pouvoir.