Le pétrole moins cher, coup de pouce temporaire au marché automobile
La chute des cours de l'or noir, qui a perdu environ la moitié de sa valeur depuis juin, est à court terme une aubaine pour le marché automobile dans son ensemble.
Cela aidera certainement (les ventes) dans la plupart des marchés, hormis dans les pays producteurs de pétrole évidemment, a estimé mardi en marge du salon automobile de Genève le patron du constructeur allemand Mercedes-Benz (Daimler), Dieter Zetsche.
Le pétrole est un des facteurs qui va soutenir la demande de véhicules, à côté d'autres éléments comme les taux d'intérêt faibles et la confiance des consommateurs, juge également Anil Valsan, expert automobile du cabinet d'études EY.
L'analyse de son homologue de PwC Autofacts Josselin Chabert va dans le même sens. Selon lui, la baisse des prix du carburant redonne de la trésorerie aux entreprises et redynamise un peu le pouvoir d'achat des ménages. Par voie de conséquence, si la tendance persiste, cela pourrait atténuer l'effet de la crise dont les pays européens ne sont pas encore vraiment sortis.
Selon les spécialistes, la baisse des prix à la pompe incite les consommateurs à acquérir un véhicule et à porter davantage leur choix sur des modèles puissants du type SUV ou crossovers, ces 4x4 citadins déjà très en vogue, en Europe comme aux Etats-Unis.Ce qui change dans le comportement des ménages américains, c'est la réorientation vers les véhicules dits énergivores (...) L'aspect consommation est un peu mis de côté, d'après Yann Lacroix, expert chez Euler Hermes.
Les taxes sur le carburant étant plus importantes en Europe, l'effet est plus faible qu'aux Etats-Unis, mais on le ressent également sur le Vieux continent, assure Stefan Bratzel, expert automobile allemand.
Bonne nouvelle pour les consommateurs, le pétrole bon marché est également positif pour les coûts de fabrication et donc pour les constructeurs. Beaucoup de composants dépendent du prix de pétrole, de nombreux matériaux sont donc devenus moins chers, ce qui est bon pour les marges, analyse Jens Wiese, du cabinet AlixPartners.
Sans compter que les SUV, qui profitent le plus de cette manne, offrent à leurs fabricants une meilleure rentabilité que des modèles moins puissants.
-L'électrique, victime collatérale?-
Tout cela porte un coup au segment des voitures électriques, dont le prix élevé devient plus difficile à justifier, constate M. Valsan, d'EY. Les consommateurs se disent qu'ils peuvent avoir un crossover familial compact pour le prix d'une voiture électrique. Dans ce contexte, cela va être délicat pour les voitures électriques, note-t-il.
Face au durcissement des normes antipollution, les constructeurs ne peuvent pourtant pas se permettre de tourner le dos à l'électrique, qui peine toujours à décoller, ni à leurs efforts pour rendre leurs véhicules moins gourmands en carburant.
D'autant qu'ils s'attendent à ce que le prix du pétrole remonte. Je ne crois pas que les prix restent au niveau actuel sur la durée, il serait donc très risqué de prendre des décisions stratégiques en fonction de ça, a ainsi expliqué Bernhard Maier, directeur des ventes de Porsche (groupe Volkswagen).
Un avis partagé par Mercedes-Benz: Nous avons une stratégie de long terme et poursuivrons sur la voie de véhicules toujours plus efficients en terme de consommation de carburant, a indiqué Dieter Zetsche.
Le prix du pétrole a certainement un impact à court terme sur la demande pour les modes de propulsion alternatifs, en particulier pour les voitures électriques mais à moyen terme ces derniers prendront graduellement une place plus importante dans le paysage automobile, a assuré Paul Willcox, président de Nissan Europe.
En attendant ce jour, les vedettes du salon de Genève qui ouvrira ses portes au public jeudi sont toujours des bolides... dévoreurs de carburant.
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