A deux semaines du sommet de l'Opep, le pétrole s'installe au plus bas depuis 2010
Après avoir chuté mercredi sous la barre des 80 dollars pour la première fois depuis 2010, le Brent a atteint 79,35 dollars jeudi à Londres, son plus bas niveau depuis le 29 septembre 2010.
Depuis son dernier pic mi-juin (à 115,71 dollars), la référence européenne du brut a dégringolé de 31%, plombée par une série de facteurs baissiers dont l'abondance de l'offre, la faiblesse de la demande et le renforcement du dollar.
Récemment, la pression baissière a été accentuée par le fait que l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ne semble pas décidée à réduire sa production lors de sa prochaine réunion prévue le 27 novembre à Vienne, malgré la surabondance d'offre sur le marché.
Comme le soulignent les analystes de Commerzbank, les derniers commentaires mercredi du très écouté ministre saoudien du Pétrole, Ali al-Nouaïmi, n'ont pas permis de clarifier la position du chef de file du cartel.
Tout ce qu'il a dit est qu'il voulait un marché du pétrole stable, des prix solides et ne pas s'engager dans une guerre des prix. Autrement dit, tout serait bien aux yeux d'al-Nouaïmi si les prix se stabilisaient au niveau actuel, ont-ils estimé.Ces derniers mois, l'Arabie saoudite a réduit à plusieurs reprises ses prix de vente en Europe et en Asie et plus récemment aux États-Unis -- ce que les observateurs ont interprété comme une volonté de sauvegarder ses parts de marché plutôt que d'essayer d'enrayer la glissade des prix de l'or noir.
Mais d'autres membres du cartel ont publiquement montré leur désaccord avec le niveau actuel des prix, qui menace leurs finances publiques.
Nombreux sont les pays perdants. On pense à la Russie et à tous les membres de l'OPEP hors péninsule arabique, comme le Venezuela, l'Algérie et le Nigeria. Ces pays ont besoin d'un prix du pétrole bien plus élevé, autour des 100 dollars, pour alimenter la croissance et éviter un déraillement du déficit budgétaire, a expliqué Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque.
- Risque de déflation en Europe -
Comme le souligne cet analyste, le marché pétrolier est entré dans un nouveau paradigme depuis l'émergence du pétrole de schiste aux États-Unis.
La première économie mondiale est passée d'une production moyenne de 5 millions de barils par jour (mbj) en 2008 à près de 8,4 mbj sur les huit premiers mois de cette année, grâce à l'exploitation des ressources non conventionnelles d'hydrocarbures.
Même si les États-Unis n'exportent pas de pétrole brut, cette forte hausse de la production américaine se répercute sur le marché mondial, puisqu'elle permet au pays de réduire ses importations, forçant ses anciens fournisseurs à trouver d'autres débouchés.
Le cas du Nigeria est particulièrement emblématique, le pays n'ayant fournit aux États-Unis qu'environ 1.500 barils par jour au mois d'août, contre 30.000 barils par jour en août 2010.
La forte dégringolade des prix du brut constitue à première vue une bonne nouvelle pour les pays consommateurs, en particulier ceux qui peinent à réellement redémarrer depuis la crise financière de 2008.
Si ce niveau (des prix) subsiste sur la durée, cela pourrait être une excellente nouvelle pour les consommateurs dans le monde entier puisque la baisse du prix du baril devrait alors être répercutée sur les prix à la pompe, a ainsi pointé M. Dembik.
Mais on l'oublie trop souvent, bien que le prix faible du baril soit positif pour le consommateur, il accentue les risques de déflation en zone euro qui sont, comme les chiffres de l'inflation le soulignent chaque mois, étroitement liés au repli des prix de l'énergie. On aurait donc tort de se réjouir trop rapidement d'un pétrole moins cher, a-t-il prévenu.