La France refuse le transfert à Hess Oil de sept permis pétroliers
M. Martin a décidé de refuser d'autoriser la mutation (transfert de propriété, NDLR) au profit de Hess Oil de sept permis exclusifs de recherches d'hydrocarbures, délivrés par le gouvernement précédent à la société Toréador et rachetés depuis par la compagnie américaine, a indiqué son ministère dans un communiqué.
Selon le ministère, une partie au moins de ces permis concernant la Seine-et-Marne, l'Aisne, l'Aube, la Marne, le Loiret et l'Yonne ciblaient initialement du pétrole de schiste, dont l'exploitation nécessite le recours à la fracturation hydraulique. Cette technique, controversée pour les risques qu'elle fait courir à l'environnement, est interdite en France par une loi de juillet 2011, validée en octobre dernier par le Conseil constitutionnel.
Hess s'est à l'origine installé en France pour chercher ce type de pétrole non conventionnel.
Même si la société Hess Oil a déclaré, afin de se conformer à cette loi, qu'elle ne l'utiliserait pas, les roches mères visées par cette société dans ses demandes de mutation ne pourraient être explorées que par cette technique interdite sur le territoire national, a souligné le ministère dans un communiqué.Dans ces conditions, les permis concernés ne peuvent plus déboucher sur une exploration effective, notamment sur aucun forage pilote, a-t-il ajouté, rappelant avoir déjà dû interdire au début de l'année à Hess Oil d'effectuer un forage horizontal, une technologie généralement associée à la fracturation hydraulique.
Ces soupçons sont rejetés en bloc par Hess Oil France, qui s'est dit dans un communiqué étonné par les intentions qui lui sont prêtées.
Sur ces permis d'exploration (...), seules des techniques conventionnelles d'exploration ont été utilisées par Hess Oil France sans dommage sur l'environnement et en pleine transparence avec les services de l'Etat et les collectivités locales concernées, a indiqué l'entreprise.
Selon le ministère, deux autres permis étaient expirés, et donc non transférables à un nouveau titulaire.
Plus généralement, le gouvernement a estimé que la filiale française de Hess Oil, qui a déposé les demandes de mutation, est une coquille vide qui ne dispose pas des compétences techniques propres, qui sont requises par le droit minier.
M. Martin, lui-même un farouche opposant à l'exploitation du gaz et du pétrole de schiste, assume au passage le risque que l'Etat doive payer des indemnités à Hess, qui réclame environ 30.000 euros par permis.
Je prends mes décisions en connaissance de cause et je les assume, a-t-il insisté dans le communiqué.
Le ministère demandera en justice, le 6 décembre, une remise de cette somme. Celle-ci doit toutefois être mise en perspective avec le coût environnemental et sociétal qu'aurait impliqué cette exploration de notre sous-sol, a estimé Philippe Martin dans un entretien au quotidien Le Parisien.
Soulagement général chez les opposants
Concernant la réforme à venir du code minier, repoussée à plusieurs reprises par le gouvernement et qui pourrait conduire à une modification des procédures d'attribution des permis, Philippe Martin souligne qu'un rapport lui sera remis le 10 décembre.
Les sept permis faisaient l'objet, comme le prévoit le code minier, d'une demande de mutation auprès du ministère.
Celui-ci, qui refusait d'accorder son feu vert, avait été condamné fin septembre par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val-d'Oise), sous peine d'astreintes, à réexaminer les demandes de Hess Oil.
Les projets de la compagnie américaine suscitent une vive opposition chez des ONG, des élus et des collectivités, qui ont salué la décision de Philippe Martin.
L'environnement en Ile-de-France est en ce sens préservé, a souligné le président du Conseil régional, Jean-Paul Huchon.
La signature de ces permis aurait constitué un dangereux précédent, a estimé le député EELV Denis Baupin.
C'est une victoire de la mobilisation citoyenne face à la guérilla juridique menée contre l'Etat par le lobby des gaz de schiste pour contourner la loi interdisant la fracturation hydraulique, a renchéri la députée PS et ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho.
La controverse sur les gaz et pétrole de schiste avait été ranimée mercredi par un rapport parlementaire favorable à une exploration expérimentale de ces énergies fossiles hautement contestées.
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