L'Opep, inquiète pour la demande, mais soucieuse de préserver les prix
Réunis mercredi et jeudi à Vienne, les douze ministres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), dont les pays pompent environ un tiers de l'offre mondiale d'or noir, ont exprimé leurs vives préoccupations face à la santé défaillante de l'économie mondiale.
"Le système capitaliste connaît une crise profonde (...) qui a transformé en menace claire et imminente la possibilité d'un effondrement de la demande mondiale de pétrole", a lancé le ministre vénézuélien du Pétrole Rafael Ramirez.
Le ralentissement de la croissance aux Etats-Unis et en Chine, les deux plus grands pays consommateurs de brut, tout comme la crise persistante de la zone euro, "risquent d'accroître la pression sur la demande de brut", a renchéri son homologue angolais José Maria Botelho de Vasconcelos.
STOCKS US À DES NIVEAUX PLUS VUS DEPUIS 1990
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) n'a pas contribué à alléger l'ambiance, en révisant une nouvelle fois en baisse mercredi sa prévision de demande mondiale de pétrole pour 2012.
Symptômes inquiétants, les stocks américains de brut évoluent à des niveaux plus vus depuis 1990, et les cours du baril se sont effondrés de 30 dollars en trois mois, tombant à Londres sous le seuil de 100 dollars.
"L'économie mondiale pourrait profiter de cette baisse des prix, qui agirait comme une sorte de stimulant pour la croissance", a avancé Gary Hornby, analyste de la firme énergétique britannique Inenco.
Et c'est d'ailleurs autant pour soulager une économie mondiale à la peine que pour compenser la baisse des exportations iraniennes, minées par les sanctions internationales, que l'Arabie saoudite, principal producteur du cartel, a dit gonfler son offre depuis décembre.
DES PRIX STABLES AU-DESSUS DE 100 USD SONT UN MINIMUM
Mais la plupart des ministres de l'Opep ne l'entendent pas de cette façon: effrayés par la dégringolade des prix, beaucoup ont indiqué leur souhait de voir les cours remonter au-dessus de 100 dollars.
"Des prix stables au-dessus de 100 dollars représentent le minimum nécessaire pour que les ressources pétrolières continuent" d'être développées, a insisté M. Ramirez, une opinion partagée par ses homologues angolais et libyen.
L'Iran et le Venezuela, les membres les plus conservateurs du cartel, ont mis fermement en cause les pays du Golfe, accusés selon eux d'entretenir "un excès de production".
Alors que l'offre cumulée du cartel se hissait en mai à 31,86 millions de barils par jour (mbj) selon l'AIE, les ministres de l'Opep se sont accordés jeudi à reconduire leur plafond de production de 30 mbj décidé en décembre, en se contentant d'exiger une meilleure discipline collective.
Et avec l'espoir qu'une baisse de l'offre d'or noir suffise à stabiliser les prix.
"Les Saoudiens étaient probablement désireux de parvenir à un consensus, et puisque leur niveau de prix idéal, qu'ils avaient précédemment fixé à 100 dollars, a été atteint, il serait logique de les voir restreindre effectivement leur offre", a commenté Filip Petersson, analyste de la banque suédoise SEB.
Cependant, si les prix se maintiennent à leur niveau actuel sans plonger plus bas, une véritable baisse de la production de l'Opep pourrait s'avérer malgré tout fort hypothétique, a-t-il averti.
De fait, les exportations saoudiennes diminuent de toute manière sensiblement durant l'été, en raison d'une plus grande consommation interne de brut pour alimenter les systèmes de climatisation.
Par ailleurs, le renforcement traditionnel de la consommation pétrolière dans l'hémisphère nord durant l'été et à l'approche de l'hiver "pourrait contribuer à absorber l'excédent de pétrole sur le marché", a ajouté M. Petersson.
rp
(AWP / 15.06.2012 12h01)